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251.3 - Les araignées (Aranéides) observées dans les milieux souterrains de Lorraine : la situation en 2018

Bernard Hamon, CPEPESC nationale (extrait de S.S.B. n°495, juillet-août 2018, CPEPESC nationale, Besançon)

mardi 9 juillet 2019

Introduction

Les araignées (Aranéides) constituent un ordre important du sous-embranchement des Chélicérés et comportent plus de 46 000 espèces réparties dans au moins 100 familles. Plus d’un millier d’entre-elles sont des troglobies réparties sur l’ensemble du globe. Les araignées troglobies présentent plusieurs caractères propres : dépigmentation partielle à totale, anophtalmie à forte réduction des yeux, allongement d’appendices… ; elles sont particulièrement hygrophiles et lucifuges. Leur cycle est ralenti ; le nombre de leurs œufs est moins important que celui des espèces épigées. Leur métabolisme est adapté à la vie souterraine.

Les sources

En Lorraine, aucun inventaire précis sur ces araignées observées sous terre n’a été établi et la liste que nous proposons résulte à la fois d’une consultation de la bibliographie régionale sur la biospéologie ainsi que de données ponctuelles recueillies au cours de récentes prospections réalisées par différents acteurs. La période couverte concerne 1900-2018. Il s’avère que les données les plus pertinentes résultent de travaux entrepris avent 1970 par les scientifiques et universitaires de Nancy : professeur L. Cuénot (R. Florentin, P. Remy, R. Husson, A. Tétry), professeur P. Remy (F. Herriot, J.-P. Henry ; G. Vaucel), professeur B. Condé (J.-L. Contet-Audonneau)… Les identifications avaient été réalisées par des arachnologues spécialisés comme L. Fage, E. Dresco, E. Simon

Les données récentes, postérieures à 1980, principalement, proviennent de nos observations et de celles transmises par des membres de la CPEPESC Lorraine ou par des spéléologues. Citons entre autres D. Morin, J.-F. Schneider, Y. Gérard, P. Grankoff, M. Ribette, J.-M. Goutorbe, D. Aupermann… Les derniers se sont limités à l’identification de quelques espèces comme Meta menardi, Meta merianæ ou encore le genre Tegenaria. Quelques identifications plus pertinentes ont été réalisées par des spécialistes lorrains des arthropodes comme G. Vaucel ou L. Perrette. Des travaux réalisés par des universitaires demeurent possibles mais nous n’en avons pas eu connaissance. Il en résulte un premier inventaire nécessairement partiel, évidemment incomplet et provisoire.

Résultat

Ce sont 20 taxons (genres et espèces) qui ont été identifiés sous terre en Lorraine, alors que le nombre réel des espèces observées est bien plus important, probablement deux fois plus (Figure I).

Famille

Genre

Espèce

Présence signalée

Statut sous terre

54

55

57

88

Trogloxène

Troglophile

Troglobie

Pholcidæ

Pholcus phalangioides (Fuessly, 1775)

X

X

Tetragnathidæ

Meta menardi (Latreille, 1804)

X

X

X

X

X

Meta merianae (Scopoli, 1763)

X

X

X

Phalangioidea

Leiobunum blackwallii (Meade, 1861)

X

X

Linyphiidæ

Porrhomma

X

Porrhomma convexum (Westring, 1851)

X

X

Porrhomma subterraneum (Simon, 1884)

X

X

X

Drapetisca socialis (Sundevall, 1833)

X

X

Lepthyphantes pallidus (Cambridge, 1871)

X

X

Lepthyphantes leprosus (Ohlert, 1865)

X

X

Theridiidæ

Theridion

X

Nesticidae

Nesticus cellulanus (Clerck, 1757)

X

X

X

X

Agelenidæ

Tegenaria

X

Tegenaria silvestris (Koch, 1872)

X

X

Tegenaria domestica (Clerck, 1757)

X

X

Amaurobiidæ

Amaurobius

 

Amaurobius ferox (Walckenaer, 1830)

X

X

Amaurobius fenestralis (Strøm, 1768)

X

X

Saaristoa abnormis (Blackwall, 1841)

X

X

Diotymidæ

Cicurina cicur (Fabricius, 1793)

X

X

Figure I : Araignées identifiées dans les milieux souterrains lorrains (période 1900-2018)

Toutes ces araignées entrent dans la composition des associations des sols et surtout des parois pour leur grande majorité : elles vivent principalement dans les porches et zones d’accès aux cavités où elles « cohabitent » avec des hyménoptères, des lépidoptères, des diptères… ainsi que des myriapodes. Dans ces habitats, elles y recherchent — et trouvent — une ambiance environnementale favorable (température et qualité de l’air, hygrométrie relative de l’air, luminosité diminuée…) mais également des potentialités alimentaires, la plupart des araignées étant au sommet de la chaîne trophique. Certaines d’entre elles s’y reproduisent comme Meta menardi dont certains individus paraissent même demeurer toute leur existence dans la même cavité, tout en pénétrant dans des secteurs plus profonds complètement dépourvus de lumière.

La plupart des araignées observées sous terre en Lorraine sont des espèces trogloxènes provenant des milieux épigés immédiats ou proches des cavités. Seules une ou deux espèces appartenant au genre Porrhomma seraient de pures troglobies : ce serait principalement le cas de Porrhomma convexum observée dans les grottes de Pierre-la-Treiche (54), ou encore dans les anciennes mines de fer abandonnées (54), respectivement par R. Florentin, P. Remy, R. Husson, ce qui représente au moins 1 % de l’ensemble des araignées reconnues — le statut cavernicole de cette espèce ayant par ailleurs été longtemps discuté par les spécialistes.

Cinq autres espèces sont considérées comme des troglophiles (ou subtroglophiles). Les troglophiles appartiennent pour deux d’entre elles à la famille des Tetragnathidæ (les deux Meta) et une à la famille des Nesticidæ (Nesticus cellulanus).

Meta menardi et Meta merianæ sont les araignées le plus régulièrement observées et généralement bien reconnues des spéléologues, surtout Meta menardi. Cette dernière a fait l’objet de beaucoup d’observations et sa présence est attestée dans des milieux souterrains des quatre départements lorrains.

Nous reviendrons probablement sur Meta menardi qui a fait l’objet de suivi dans plusieurs cavités de Moselle à Baerenthal, Dalem ou encore Longeville-lès-Saint-Avold. Ce premier listage est une étape sur la présence des Aranéides présents sous terre en Lorraine.

Piste de lecture : Michael J. Roberts (2009) - Guide des araignées de France et d’Europe, coll. Les guides du naturaliste, Ed. Delachaux et Niestlé, Réimp. 2010, Paris, 383 p.

Compléments de la rédaction :

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