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253.2 - Traversée du réseau du Verneau

Lucas Schaeffer

mardi 3 septembre 2019

Participants : Lucas Schaeffer et Sylvain L. (club ABIMES)

Après deux semaines de canicule dans le Doubs, une absence de pluie et un débit du Verneau de 44 L/s au niveau de la station de mesure à Nans-sous-Sainte-Anne, les conditions étaient enfin réunies pour réaliser la traversée du mythique réseau du Verneau en entrant par le gouffre du Bief-Bousset et en ressortant par la grotte Baudin. Pendant plusieurs jours, des centaines de messages sont échangés, les topographies sont étudiées et mémorisées et nous surveillons les relevés du débit du Verneau toutes les six heures. Sylvain et moi avons décidé que le mercredi 26 juin serait le jour de la traversée. Nous avons réservé le gîte spéléo à Montrond-le-Château afin de pouvoir rester trois jours dans le Doubs. Le mardi a été le jour du repérage de l’aval par mes soins jusqu’à la salle Belauce afin de reconnaître l’itinéraire et de vérifier la présence des cordes dans les puits du Balot et du Légionnaire ainsi que l’absence d’eau au carrefour de la galerie des Aiguilles. Le mercredi a été le jour de l’équipement du Bief-Bousset et de la traversée. Nous avons déséquipé le gouffre du Bief-Bousset le jeudi matin. L’amont jusqu’au siphon des Patafouins avait déjà été repéré par mes soins en février.

Récit du jour de la traversée

Nous quittons le gîte à 7 h 30, après une longue revérification des sacs et du matériel, et nous prenons la direction du parking de la grotte Baudin afin d’y laisser une voiture pour le retour à la fin de la traversée. Une fois la voiture de Sylvain déposée, nous nous rendons au gouffre du Bief-Bousset qui sera notre point d’entrée dans le réseau. Il est 8 h 30 quand nous commençons à nous mettre en tenue. Nous profitons des quelques barres de réseau pour revérifier une dernière fois la météo avant de nous engager pour de nombreuses heures sous terre. Heureusement, les prévisions sont toujours excellentes. Je commence à équiper la cavité à 9 h. Les premiers puits s’enchaînent rapidement car je connais déjà la zone et, en avançant à deux, il n’y a pas d’attente. Nous arrivons à la salle de la Décantation où nous déposons un kit de cordes de secours qui servira en cas d’absence des cordes des puits situés après le long méandre qui suit. Nous traversons le méandre en une heure. C’est un passage peu agréable en raison du kit volumineux avec le bidon et la néoprène. Heureusement, comme prévu, les puits situés après le méandre sont bien équipés. Nous enfilons nos néoprènes au sommet du P6 final avant de franchir une série de passages humides qui nous amènent dans le collecteur à –197 m.

Nous marchons dans le collecteur où nous avons de l’eau au maximum jusqu’aux mollets et en profitons pour faire de nombreuses photos. Après 1 h de marche, nous arrivons devant le fameux siphon des Patafouins. À partir d’ici, deux choix s’offrent à nous : passer par la cheminée des Dentelles et une série de puits qui shuntent le siphon, ou franchir le siphon, long de 3 à 6 m (selon le niveau d’eau), en apnée. Après plusieurs minutes d’hésitation, nous décidons de passer par le siphon... mais aucun de nous ne veut passer le premier. Je saisis un galet au sol et fais une croix sur une face. Et nous tirons à pile ou face pour savoir qui devra passer en premier... « pile » et zut... je suis désigné pour franchir le siphon. Le visage un peu pâle et le cœur qui bat la chamade, je prends une dernière respiration, saisis la corde en place à pleines mains et je plonge dans l’eau marron en tirant sur la corde. Après une quinzaine de secondes, j’émerge de l’autre côté du siphon. Je reprends mon souffle et, après plusieurs minutes, Sylvain me rejoint. Nous sommes ravis de cette épreuve qui semble bien effrayante mais qui est finalement très facile à passer. Nous franchissons une voûte située juste après le siphon et, après une courte galerie et le passage du Tube en U, nous arrivons dans la salle du Bivouac. Cela fait environ 4 h 30 que nous sommes sous terre.

Nous traversons cette salle par la Barre des Écrins en suivant les nombreux scotchlights qui indiquent le chemin et franchissons la trémie qui permet d’accéder à la salle Jarbraud de Bois. Au bas de cette deuxième salle, une corde permet de descendre un talus terreux et de retrouver la rivière à –229 m. Nous suivons la rivière jusqu’à arriver à une intersection où il faut choisir entre suivre la galerie du collecteur ou passer par la galerie de la Côte Jamey. C’est par cette dernière que nous passerons. La galerie est magnifiquement concrétionnée et sèche. Nous prenons de nombreuses photos et continuons notre épopée dans la joie et la bonne humeur ! Après celle-ci, nous retrouvons la rivière au niveau du puits du Vieux Fou et c’est ici que la rigolade commence. Nous arrivons à la galerie des Bassins, nommée ainsi en raison de bassins profonds où il faudra nager. Nous enfilons les cagoules et rangeons tout le matériel sensible dans les bidons. Seule la GoPro nous accompagnera pour filmer la « grâce » de notre nage avec néoprène et baudrier dans l’eau à 8 degrés. Nous nous amusons dans cette galerie magnifique, en raison de son côté aquatique, et nous nous jetons à l’eau avec plaisir.

Une fois la galerie passée, nous arrivons dans la salle de la Corniche que nous franchissons en suivant une longue main courante qui traverse la salle le long de la paroi au-dessus des eaux tumultueuses. Nous passons le bassin Merdique qui est tout sauf merdique à notre arrivée : eau claire et concrétions. Que demander de plus ? Après une ultime flaque, nous arrivons dans le plus grand volume de la cavité : la salle du Bon Négro. Nous y prenons une longue pause, cela fait 9 h 20 que nous sommes sous terre, et nous avons déjà réalisé les deux tiers de la traversée. Nous quittons les néoprènes pour quelque chose de plus léger à porter. Après une tentative ratée de faire sécher ma combinaison à la chaleur des bougies, nous reprenons la route et arrivons rapidement à la salle du Petit Négro (-292 m) puis à la salle Belauce. A partir de là, nous sommes en terrain connu. Nous faisons un rapide détour pour aller voir le Tripode que Sylvain casse lors d’un mauvais mouvement. Heureusement, nous avions prévu cet incident et amené un tube de colle UHU stick qui, mélangée à un peu d’argile, devient une très bonne colle et permet de réparer ce petit bout de calcite. Les suivants n’y verront que du feu. :-)

Nous suivons l’itinéraire que j’ai reconnu la veille et franchissons le puits du Légionnaire, la galerie des Plaquettes et le puits du Balot. Nous arrivons désormais dans les vastes volumes de la grotte Baudin. Nous traversons les magnifiques salles des Momies, Christian Devaux, Blanche, Fournier (‑360 m) et Nanette. Nous fatiguons, la marche semble désormais bien longue entre chaque salle et Sylvain accuse un petit coup de mou dû au manque de sommeil. Nous arrivons finalement à proximité du bassin de la cascade du Verneau (-387 m) d’où démarre la main courante câblée, point de passage qui a été façonné pour finir d’achever les bras des spéléos fatigués. Une belle remontée plein vide, un boyau aux dimensions « meusiennes », un dernier puits et nous arrivons dans la salle Hope. La sortie n’est plus très loin. Nous franchissons les derniers beaux passages de la cavité et nous arrivons au départ du ramping de sortie de la cavité. Sylvain voit que je n’ai pas envie d’y aller... « c’est long ? » qu’il me dit... Je réponds : « avançons... on est presque dehors... ». Le courant d’air aura au moins comme avantage de sécher nos dernières mèches de cheveux mouillées. À proximité de la sortie, je dis à Sylvain que j’ai caché la veille une petite récompense dans le boyau pour nous féliciter... Je la sors de derrière un rocher : il s’agit d’une bouteille de bière avec un joli nœud en cordelette pour décorer ! Encore quelques mètres... et... nous sommes dehors ! Il est 21 h 20 ! Nous avons bouclé la traversée à deux et en équipant le Bief-Bousset dans la foulée en 12 h 20 !

Nous nous posons à côté de la rivière qui refait surface après la source du Verneau et trinquons à notre victoire ! Une traversée magnifique, sportive et vraiment agréable. Nous la referons avec plaisir et, qui sait, peut-être en remontant le réseau pour changer ! Nous rentrons au gîte bien heureux pour prendre une douche et un repas bien mérités. Le lendemain matin, nous déséquipons le Bief-Bousset et lavons l’intégralité du matériel. C’est ainsi que se finit une traversée que nous convoitions depuis 6 mois et qui, personnellement, ne m’est jamais sortie de la tête. Nous rentrons chez nous, l’esprit rempli de beaux souvenirs.

Film de la traversée : https://www.youtube.com/watch?v=_TL9bQtYbtg

Récit détaillé avec nombreuses photos sur : http://mission-speleo.over-blog.com/2019/07/traversee-du-reseau-du-verneau.html

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