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54.2 - Nouvelles du spéléodrome de Nancy : la fontaine intermittente et la Petite Sirène

Daniel PREVOT

mercredi 1er janvier 2020

Lundi 11 novembre, lors d’une visite d’inspection du Puits de la Haute-Borne en vue des travaux de sa réhabilitation, Pascal CUXAC et moi-même avons été témoins d’un intéressant phénomène acoustique que d’autres avaient sans doute déjà remarqué sans en comprendre l’intérêt et ne l’avaient donc pas signalé.

Au niveau du deuxième palier (soit à une douzaine de mètres du fond), s’ouvre une galerie que nous avons décidé de visiter. Cette galerie est en forme de T dont la « jambe » s’ouvre dans le puits. L’ouverture a été munie d’un barrage d’environ 60 cm de haut pour retenir l’eau derrière. Dès le départ on a de l’eau largement au dessus des bottes, le niveau augmentant au fur et à mesure que l’on s’approche du carrefour. Avec son habituelle gouaille méridionale Pascal s’est exclamé dès le début (lire « avé l’assent ») Bouuhh !!!... je la trouve un peu fraîche .

Arrivés au carrefour du T, un grondement croissant en intensité, suivi d’un étrange glouglou de lavabo en phase de vidange et terminé par un silence émaillé du son cristallin émis par la chute de gouttes d’eau, vint nous surprendre. Interloqués, nous nous interrogions d’un regard semblant dire chacun à l’autre Mais nooonnnn !!! ... une crue en cet endroit, c’est impossible... pour nous rassurer, quand l’étrange phénomène se reproduisit une première fois puis une deuxième, puis... Alors nous décidâmes d’un tacite accord d’avancer prudemment vers l’auteur mystérieux de ce chant curieux et périodique qui provenait de la branche droite du T. Nous le découvrîmes huit mètres plus loin. À notre approche, il se fit de plus en plus modeste jusqu’à devenir à peine audible. Il s’agit d’un trou au plancher de la galerie, d’une dizaine de centimètres de diamètre, encombré de cailloux, et dans lequel l’eau pénètre. Voilà notre émetteur. La morphologie de la galerie en cet endroit, la transforme en un remarquable amplificateur acoustique et il semble que l’emplacement optimal pour profiter de ce concert inattendu soit le carrefour du T.

À l’issue de la visite du Spéléodrome par la Section Lorraine de l’Union Française de Géologie le 10 mars 2001, son Président Yvon DROUILLET m’avait affirmé avoir observé un phénomène d’intermittence dans la zone du puits de la Haute-Borne, sans pouvoir en préciser l’endroit que j’avais recherché en vain. Cet événement me revint en mémoire et je le rappelai à Pascal. Nous laissâmes la « Petite Sirène du Spéléodrome » poursuivre ses borborygmes réguliers et redescendîmes à la base du puits pour reprendre la galerie principale à la recherche du phénomène signalé. Nous l’avons trouvé juste après le 2e serrement (la « porte de sous-marin », un 1er serrement prévu au point 1510 entre les Puits de Saint-Julien et de Clairlieu n’a jamais été achevé), deux mètres après le point marqué 3562. Une magnifique fleur au plafond laisse écouler l’eau avec une intermittence régulière.

Nous allons tenter de donner une explication de ce phénomène remarquable, celle-ci n’engage que son auteur.

Nous avons ici deux galeries superposées, disons l’inférieure et la supérieure. La supérieure est un drain court creusé dans la roche aquifère afin d’alimenter en eau l’inférieure qui est le collecteur général. En de nombreux autres endroits du Spéléodrome on peut constater l’existence de drains supérieurs semblables réalisés dans le même but. Le trou observé au plancher de la galerie supérieure une dizaine de mètres au dessus de la galerie inférieure, est le sommet du tube de liaison foré entre les deux galeries. Ce tube est plus ou moins entartré par la calcite déposée par l’eau qui s’y écoule gênée par des cailloutis. Le volume de l’eau qui arrive au sommet du tube est supérieur à celui qu’un écoulement laminaire dans le tube permet. Le tube se remplit donc en émettant le grondement que l’on remarque (mettez une bouteille sous un robinet et écoutez le chant émis lors du remplissage). Sous l’effet de la pression augmentante, la vitesse de l’écoulement laminaire augmente également pour devenir tourbillonnaire en créant un tube d’air en son centre. Le débit du tube dans la galerie inférieure devient alors plus élevé que celui de l’apport en eau au sommet du tube. Ce dernier se vide alors comme un lavabo en émettant les glouglous caractéristiques. Le tourbillon cesse, l’écoulement redevient laminaire et le phénomène recommence. Dans la galerie inférieure, à l’écoulement laminaire correspond un faible débit de la fontaine, tandis qu’à l’écoulement tourbillonnaire correspond un fort débit. La fontaine est ainsi intermittente.

Ce phénomène est à présent à étudier : époques de l’année où il apparaît, périodicité... Je suis prêt à parier que le couple « petite sirène - fontaine » recevra dans un futur proche de nombreux visiteurs.

Nous y sommes retournés samedi 29 novembre, la sirène chantait presque en continu, mais de façon très irrégulière, l’apport en eau était beaucoup plus important. Il m’a semblé qu’il y avait sur le trou quelques gros cailloux qui n’y étaient pas le 11 ???

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