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205.1 - La station de Niphargus virei (Chevreux, 1896) de Villers-lès-Nancy (54)

Bernard HAMON

mardi 8 septembre 2015

(extrait de Scories Spécial Biospéologie n° 418, août 2013, revue de la CPEPESC Lorraine)

Découverte et travaux du professeur R. Husson (1911 – 1989)

De 1933 à 1937, Roger Husson, alors conservateur au musée zoologique de Nancy, sur les conseils du professeur Lucien Cuénot, effectue de nombreuses incursions dans les milieux souterrains artificiels (mines, carrières,...) du Grand Est de la France, pour y étudier la faune cavernicole. C’est ainsi que le 18 novembre 1936, à Hardeval, il découvre une station de Niphargus virei et il y prélève deux mâles, dix femelles et quatre juvéniles. En 1939, R. Husson, qui a obtenu son doctorat en zoologie, publie ses travaux et dans l’inventaire des stations de Niphargus virei (Chevreux, 1896), qu’il a découvertes et écrit : « [...] Mines de fer de Lorraine... Bassin de Nancy... Hardeval, 18/11/36 : 2 mâles, 10 femelles, 4 juvéniles » et il précise qu’il a trouvé ses individus, tous sites confondus dans « des ruisseaux à fort débit ». En 1947, le professeur Husson, alors en poste à l’université de Sarrebruck (Sarre – R.F.A.) entreprend des recherches sur la biologie des crustacés stygobies (Niphargus, Proasellus, Cæcosphæroma). Pour Niphargus, son choix se porte sur N. virei. Pour approvisionner ses aquariums il va chercher des spécimens à Auboué et à Hardeval. Pendant au moins deux années, ses études portent sur la nourriture, la température de l’eau, la reproduction, la natalité, les mues de Niphargus. En 1949, il publie ses travaux en précisant l’origine exacte de ses amphipodes : « [...] un quatrième lot du 2/4/1947 de 9 mâles et 4 femelles provenait de la galerie de captation d’eau de Hardeval près de Nancy, galerie à flanc de coteau où l’eau est seulement à 9 °C ».

Bonne identification du site de Hardeval

En premier lieu, il convient de préciser que Hardeval n’est pas une commune mais un lieu-dit situé sur le ban communal de Villers-lès-Nancy. D’autre part, ce réseau souterrain n’est pas une mine de fer même si la galerie principale qui a été creusée dans la couche ferrifère de l’Aalénien a pu, à une période ancienne être exploitée pour ce minerai. En effet, dans le massif de Nancy, il n’y a pas de concession portant le nom de Hardeval, pas plus que celui de Villers-lès-Nancy, les concessions les plus proches étant celles du « Montet », de « Haye » et de « Laxou » qui ont été exploitées au courant du XIXe siècle. Par contre, le réseau souterrain de Hardeval résulte d’une suite de travaux engagés par la ville de Nancy à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle ; pour capter de l’eau pour alimenter la ville en eau potable. Les galeries drainantes seraient entrées en service entre 1904 et 1909. C’est sa galerie principale qu’a visitée R. Husson en 1936. Dans les années 30, la ville de Nancy abandonne cet approvisionnement dont l’eau, trop riche en carbonate de calcium, colmatait progressivement le réseau d’alimentation.

La « Mine de Hardeval » et la « Galerie de captation d’eau de Hardeval » désignent le même et unique milieu souterrain.

Puis naît le « Spéléodrome »

C’est dans ce complexe souterrain composé de galeries et puits drainants, de rigoles d’écoulement des eaux et de réservoirs que la F.F.S. après passage d’une convention avec l’agglomération nancéienne, aménage à partir de 1993*, le Spéléodrome de Nancy. C’est dans ce site que l’année même de la création de ce dernier que des spéléologues observaient la présence de Niphargus et de Cæcosphæroma (SSB n° 413 de mars 2013).

Dès 2005–2006, ils décidaient, dans le cadre des activités scientifiques de la LISPEL, d’étudier le Spéléodrome sous plusieurs angles : historique, géologique, karstologique, hydrologique et biologique. Un programme était mis en œuvre : pose de témoins, topographie du site, analyse d’eau (pH, conductivité, température,...), étude de la faune. Pierre Révol, responsable de la commission scientifique de la LISPEL coordonnait ces actions.

Ces propositions ont été exposées lors des Journées de la spéléologie scientifique du Grand Est qui se sont tenues les 21 et 22 octobre 2006 à Villers-lès-Nancy (54).

Dès le 24 octobre 2006, nous contactions P. Révol. Après une série d’échanges de correspondances et d’envoi de crustacés prélevés dans les galeries du Spéléodrome, nous pouvions confirmer le 11 juillet 2008 que les amphipodes récoltés appartenaient bien à l’espèce Niphargus virei.

Les authentifications avaient été réalisées par Mme Marie-José Dole-Olivier, chargée de recherches au C.N.R.S., attachée à l’université Claude Bernard de Lyon 1 – (in lit. M.-J. Olivier du 10 juillet 2008 ; SSB n° 342, 346 et 359).

Il ne s’agit donc pas d’une nouvelle station de ce crustacé mais de la redécouverte du site décrit par R. Husson, dès 1936. Cette situation est d’autant plus intéressante qu’elle permet d’apprécier, dans la durée, la permanence d’une communauté de Niphargus virei dans le même habitat, sur une période de 77 années.

Depuis environ dix ans, les spéléologues remarquent régulièrement la présence de ce Niphargus et font état, ponctuellement, de leurs observations. Nous évoquerons le statut de cet amphipode dans un futur SSB.

Pistes de lecture

· Scories Spécial Biospéologie (notamment les numéros 265, 325, 337, 342, 346 et 359)

· Le P’tit Usania, mensuel d’information de l’USAN ; http://usan.ffspeleo.fr

* N.D.L.R. : les travaux ont commencé en 1989. La convention entre la CUGN et la LISPEL a été signée le 24 juillet 1990. Le Spéléodrome a été inauguré lors du trentenaire de l’USAN fin novembre 1991.

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