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158.6 - Une sape à Port-sur-Seille (54)
Pierre Revol
vendredi 7 octobre 2011
Le 11 juillet, Monsieur GEOFFROY, maire de Port-sur-Seille contacte Daniel PRÉVOT pour signaler un effondrement sur une excavation dans un champ de sa commune et demande que des spéléologues viennent visiter l’endroit. Un appel sur la liste de diffusion de l’USAN est lancé et le vendredi 22 juillet je me retrouve avec Daniel, Jean-Michel, Jean-Baptiste avec M. le Maire à Port-sur-Seille.
Nous pouvons observer, en bordure d’un champ de colza moissonné, un entonnoir d’environ 3 mètres de diamètre et 2,5 mètres de profondeur, qui s’est ouvert dans la culture. Au fond de cet entonnoir s’ouvre une ouverture pénétrable d’environ 50 cm de largeur sur 40 cm de hauteur, sous une dalle de calcaire. Au fond de la cavité il est possible d’apercevoir de l’eau et des boisages, après une pente argileuse. Faute d’équipement, la visite est remise à une date ultérieure. Il est possible de constater que la galerie s’est effondrée au droit du réseau de drainage agricole de la partie, un collecteur a été coupé et est visible dans l’entonnoir en surface.
Les agriculteurs exploitant la parcelle nous ayant rejoint, la discussion s’engage et nous conduit à aller voir un petit effondrement, situé à un kilomètre environ. Il s’agit d’un trou d’une cinquantaine de centimètres environ de diamètre et autant de profondeur, qui se prolonge par un conduit cylindrique de 15 cm de diamètre. Les photos prises montreront qu’au fond du conduit se distingue un cône de terre. Il doit donc s’agir d’un petit fontis, un effondrement en train de remonter vers la surface, après avoir pris naissance en profondeur, peut-être à partir d’une ancienne galerie.
La discussion se continue et dans l’axe des deux effondrements, nous constatons l’existence d’un bosquet, qui détonne dans cet environnement exclusivement agricole. Il est curieux que les agriculteurs locaux aient épargné ces quelques arbres, à priori sans intérêt sylvicole. Une rapide exploration du boisement nous fait constater l’existence d’une ancienne excavation, aujourd’hui remplie de gravats et de souches. Nous prenons rendez-vous pour le 4 août, afin de visiter et de topographier la cavité pénétrable.
Cette seconde visite nous permet d’observer une galerie étayée de poutres carrées, séparées par des rondins et habillées de planches. La partie visitable est courte, car à la base du cône d’éboulis, lorsque l’on arrive dans la galerie intacte, celle-ci plonge curieusement vers le bas et est remplie d’eau. M. le Maire a pris contact avec les pompiers, dans l’espoir qu’ils réalisent un exercice de pompage permettant de pénétrer un peu plus loin dans cette cavité.
Daniel a contacté des spécialistes des ouvrages souterrains (Jean-Paul DELACRUZ et d’autres confrères), qui, après étude des boisages, semblent s’accorder sur une origine militaire de cette sape, qui correspondrait assez bien à une galerie allemande, orientée vers la vallée de la Seille et les lignes françaises. En 14-18, des combats ont en effet eu lieu dans le secteur de Port-sur-Seille et Nomeny, qui pourraient expliquer la création, puis l’oubli de cet ouvrage.
La constatation de l’alignement des effondrements et du bosquet où une ancienne excavation est visible plaide pour l’existence d’une galerie rectiligne d’environ deux kilomètres de longueur.
D’un point de vue géologique, le site se trouve dans les Calcaires à Gryphées, de l’Hettangien / Sinémurien. Cette formation est constituée d’une alternance assez régulière de bancs calcaires et de bancs argileux. Un de ces bancs calcaires a d’ailleurs permis la création de l’accès à la galerie, en soutenant les terres le surmontant.
(N.D.L.R. : Nous remercions madame Odile PAIX, propriétaire exploitante agricole du terrain, d’avoir laissé, malgré la nécessité des travaux agricoles, l’endroit en l’état pour nous permettre de l’étudier.)