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268.4 - Villers-lès-Nancy (54), Réseau souterrain de Hardeval : effectifs et espaces de vie de Niphargus virei, le point en 2020

Bernard Hamon

jeudi 3 décembre 2020

En 2013-2014 nous avons exposé une première approche sur la situation de l’Amphipode Niphargus virei dans le réseau souterrain de Hardeval — le Spéléodrome — de Villers-lès-Nancy (54) (S.S.B. n° 418 — repris dans L.P.U. n° 205 — 424 et 426). Parmi les questions soulevées, nous posions celle, délicate, de la quantification de la population de ce Crustacé dans les parties accessibles du réseau — voire dans le karst traversé par celui-ci. Pour tenter, sinon de répondre à cette question, de mieux en cerner le sujet, nous avons choisi deux voies complémentaires d’approche, respectivement, la première qui consiste à prendre en compte les dénombrements effectués, la seconde à considérer les espaces préférentiels — ou de concentrations — de vie de Niphargus virei. Il ne s’agit pas d’un travail scientifique mais d’une démarche de prise en compte des informations recueillies sur le réseau entre 2001 et 2020, principalement par les spéléologues qui ont bien voulu nous communiquer leurs observations ; citons, sans être exhaustif, B. Discours (plongeur), M. Maujean, E. Kuhn, D. Prévot, Chr. Prévot, T. Prévot (plongeur), P. Revol, M. Thomas… Parallèlement des références ponctuelles ont été recueillies dans différentes publications (Le P’tit Usania, Mardelle, Spéléo L, S.S.B., L’Est républicain, Sous terre…).

Effectifs de Niphargus virei de 2001 à 2020 (Figure I) :

De 2001 à 2020, au moins 25 sorties à Hardeval ont pris en compte la présence de Niphargus virei (ou font référence à sa présence). Il apparaît que deux séquences ont fait l’objet d’observations plus soutenues, 2005-2007 et 2012-2017. Dans les deux cas, les relevés montrent que les effectifs simultanément observés — qui ne sont pas les effectifs réellement présents dans le réseau — peuvent être significatifs. Pendant cette période, cumulativement, 216 Niphargus ont été comptabilisés. Les individus observés sont majoritairement des adultes, les immatures représentant 15 % des observations. Mâles et femelles sont présents, les femelles ovigères représentant 3,1 % de la population. Chaque comptage se différencie tant par les espaces de vie considérés et pris en compte — voir plus loin — que par le nombre d’individus effectivement présents, d’un à au moins 33. Les mois au cours desquels les effectifs sont les plus nombreux sont respectivement mai et septembre (à deux reprises), février, mars et novembre, mois au cours desquels plus de 15 individus ont été dénombrés ! C’est en février, septembre et novembre qu’ont été repérées les femelles ovigères qui apparaissent donc lorsque les effectifs eux-mêmes sont élevés. En l’état, il n’est pas déterminé si les femelles ovigères venaient ainsi par dérive depuis le biotope originel ou si les pontes se produisaient dans le milieu limite — le réseau proprement dit — après leur dérive. Pour mémoire rappelons que le professeur R. Ginet, grand spécialiste des Niphargus et de cette espèce en particulier, avait mis en évidence que la reproduction de Niphargus virei avait lieu tout le long de l’année, mais qu’il existait une périodicité saisonnière des pontes (avec un maximum de mai à juin et un minimum de novembre à décembre). La reproduction et les pontes au sein même du réseau limite de Hardeval paraît à peu près certaine.

    **************************Image LPU268_graphique_niphargus.jpg

Les espaces de vie de Niphargus virei (Figure II) :

S’il est acquis que Niphargus virei est présent sur l’ensemble du réseau de Hardeval (niveaux haut et bas) au moins depuis le puits de Clairlieu jusqu’à l’œil de la galerie, l’espèce a été observée dans des espaces précis qui paraissent bien lui convenir : les individus peuvent même y former des concentrations — des « clusters ». Cela concerne au moins trois types d’espaces :

  • le milieu originel karstique dans lequel se situe l’aquifère phréatique traversé par la galerie drainante reliant, au niveau supérieur, les puits de Clairlieu et de Saint-Julien. L’eau issue des fissures et anfractuosités de la roche s’écoule dans la galerie dans laquelle sont observés des Amphipodes ;

  • l’espace de dérive des Crustacés, constitué par les voies d’écoulement du réseau hydrographique artificiel (tuyaux, parois des puits, galeries…), l’eau y circule de manière pérenne mais les débits peuvent être fluctuants suivant les conditions météorologiques extérieures ;

  • des espaces aquatiques moins agités constitués de secteurs naturels (gours, petites laisses d’eau) et anthropisés (bassins, réservoirs terminaux) pouvant par ailleurs être tapissés de limon.

Espaces

 

 

Données

Espace karstique - galerie haute

Espace de dérive - écoulements

Espaces anthropisés - calmes

Puits : de la base de Clairlieu à Saint-Julien

De Saint-Julien à l’œil de la galerie

Bassin de rétention de Clairlieu

Réservoirs en fin de réseau

Nombre d’individus observés (fourchette) :

Dont :

 

≥ 1 à 33

 

0 à ≥ 4

 

 

≥ 1 à 12

 

≥ 1 à 8

- femelles ovigères

X

 

 

 

 

- juvéniles

X

 

 

X

 

Position de Niphargus virei :

- isolés (non regroupés)

 

X

 

X

 

 

X

 

X

- en « clusters »

X

 

 

 

X

Température de l’eau (°C)

 

 

 

9,5

8 à 9

Figure II : Villers-lès-Nancy (54), Hardeval
Principaux espaces de vie de Niphargus virei répertoriés en 2020



En dehors du karst originel, l’ensemble du Spéléodrome constitue un milieu limite pour les formes de vie aquatique qu’il accueille et dont la température médiane de l’eau se situerait à 9±1 °C.

Les récentes observations font donc apparaître que la population visible de Niphargus virei dans le réseau de Hardeval s’avère plus importante que ce que montraient les premières données. Plus d’une trentaine d’individus simultanément présents témoignent de la réelle potentialité de ce milieu. Un certain nombre de facteurs encore mal connus sont favorables à la présence, au maintien et à la prospérité de cette population : la température de l’eau, une oxygénation de l’eau assurée par son brassage (chutes, circulation active…), l’existence de sources de nourriture (matière organique apportée par les eaux, décantées dans les limons, la présence ponctuelle de cadavres de crapaud, celle constante des Isopodes Cæcosphæroma burgundum).

Dans les niveaux supérieurs du réseau, les Amphipodes ont également la possibilité de regagner le milieu karstique originel en remontant le long des fissures, voire des parois calcifiées, ce qui assure des liens constants entre les individus de l’ensemble de la population.

Enfin, les témoignages d’une reproduction effective — présence de juvéniles, de femelles ovigères — traduisent un des aspects importants de la dynamique de cette population de Niphargus virei qui vit à Hardeval parfaitement adaptée.

Photos : « cluster » de Niphargus dans les gours de la galerie annexe de contournement du collecteur principal à la base du puits de Clairlieu (clichés : Chr. Prévot, nov. 2006, nov. 2014, sept. 2015)

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