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289.2 - Ça y est !

Théo Prévot

jeudi 1er septembre 2022, par Bertrand Maujean

Ça y est, nous y voilà… Pyrénées centrales... 25 mai 2022… Stage module 1 « Tests techniques » du monitorat fédéral de spéléologie...

Après 10 minutes de piste dans la forêt ariègeoise nous (Sylvain, un autre stagiaire avec qui je covoiture, et moi) arrivons enfin à destination. Sur place nous retrouvons Alexandra venue elle aussi passer le module technique du moniteur (à savoir qu’il est maintenant possible de passer M1, M2 et M3 dans l’ordre de notre choix avant de terminer par l’encadrement d’un stage initiateur). Sont également présents, Nicolas (instructeur fédéral, BEES, DESJEPS et organisateur du stage), Harry (moniteur fédéral, BEES et instructeur en devenir) et Vincent (instructeur fédéral et DESJEPS). Nous déchargeons les affaires et passons directement en salle pour un petit briefing de la semaine qui s’annonce d’ores et déjà bien dense !

Après un petit tour de table, Nicolas nous présente les attentes du stage et les points importants à considérer. Nous sommes tous autonomes et le but est simple : être efficace et avancer ! (Le tout en sécurité bien évidemment). La particularité de ce stage par rapport aux autres et que nous ne travaillerons pas sur des plages horaires fixes, mais sur un objectif. Autrement dit, si l’objectif est d’aller à ‑400, eh bien on va à ‑400 et si on rentre en pleine nuit… on rentre en pleine nuit. Nicolas ne manque pas de nous rappeler le petit S de « progression avec kitS » qui figure dans les attentes. Ceci fait, un temps nous est consacré afin de poser les questions qui pourraient nous venir en tête ou pour lesquelles les réponses peuvent diverger selon les « tribus » (y comprendre, moi je viens de Tataouine et pour le passage de nœud on fait telle méthode, mais les autres ils font comme ça… et le nœud de chaise-double et… Mais si, vous voyez, le genre de discussions qui n’en finissent pas une fois minuit passé).

L’objectif pour demain est donné puis nous passons à table. J’en profite pour dire que le gîte (La Bernadole) est vraiment royal et le repas entrée-plat-dessert n’est pas sans nous déplaire ! Le tout pour un prix très correct. Si vous avez l’occasion d’y passer je vous le recommande !

Il est 20 h 30, l’heure pour nous (les stagiaires) d’aller préparer nos kits, demain nous avons pour objectif la salle de la Famine (réseau Georges) en passant par l’entrée A1 puis par le réseau des Escalades 2000. La salle se situe dans la zone des ‑400 et représente un bel objectif de test (passages étroits, méandres parfois glissants, pas mal d’équipement, très peu fréquenté, ne pas oublier son taraud). Au total nous aurons 6 kits de matos.

Nous terminons de préparer nos affaires personnelles, d’harnacher les kits afin de ne pas traîner le lendemain matin et allons nous coucher.

5 h 45 le réveil sonne, nous engloutissons un petit déj’ bien copieux et prenons la route. Le trou s’ouvre vers 1 500 m d’altitude, un peu au-dessus de l’étang de Lers. Cet étang a la particularité d’être sur une couche de roche dont le nom est originaire du massif de Lerz, j’ai nommé : la lherzolite. Cette roche constituera un bon repère sous terre et marquera également une zone très friable dans laquelle les spits ne tiendront donc pas.

Nicolas nous explique pour la petite histoire qu’ils ont dû coller des grosses tiges filetées sur 80 cm de profond pour constituer des ancrages « safe » dans la partie classique du réseau voire qu’ils sont même à certains endroits allés chercher le calcaire 3 m plus haut pour doubler les points...

L’échauffement commence par une petite montée d’une trentaine de minutes. Nicolas est venu repérer à l’avance l’entrée pour s’assurer qu’il n’y a plus de neige et mettre en place un balisage afin qu’on retrouve la voiture facilement en sortant.

Étant prêt le premier je me lance dans l’équipement suivi par Harry, jusque-là rien d’anormal. La suite n’est pas toujours évidente avec plusieurs départs de méandre, nous arrivons sur un P40, je ne trouve pas de spits où je les aurais vus. Je bricole un AN et descends, une première dév’, une seconde, bizarre… j’ai dû rater un truc ! En effet c’était un peu plus haut, la loose, je remonte, mets les points et redescends. Quelques puits s’enchaînent puis je passe la main au suivant. Les successions de passages désobés où les courants d’air frais sont bien perceptibles et de puits ne sont pas transcendantes sur cette partie. On suit le pendage, quelques passages en oppo et c’est de nouveau mon tour.

Il est midi passé, pour ne pas perdre de temps et ne pas se refroidir en faisant de pause certains en profitent pour manger. Je suis quasiment en bout de corde et il ne me reste plus rien en matos, c’est con j’ai juste un frac à côté de moi. N’ayant rien pour l’équiper je me débrouille pour faire une dév’ que je double (c’est dire) et croise les doigts pour atteindre la margelle quelques mètres plus bas. Après une courte hésitation Vincent préfère faire parvenir le matériel adéquat pour installer le fractio. Mon kit étant vide je redonne la main à Sylvain, qui ne manquera pas de replanter un point pour poursuivre dans sa lancée, repris plus tard par Alex. L’équipement et la description semblent un peu différents de ce que nous voyons, personne ne connaît la cavité, nous cherchons un moment un pendule. Tout le monde lit et relit le descriptif, mais où est le bon passage ? Après une courte escalade je trouve finalement la suite, Alex s’engage je profite d’une margelle d’argile séchée pour manger mes lentilles. La suite ne semble pas plus évidente que cela, nous sommes sur les dernières longueurs il ne reste que trois puits pour atteindre l’objectif, mais pour ne pas trop déborder de ce premier jour nous décidons de rebrousser chemin. La sortie (déséquipement compris) se fait à bon rythme, nous sortons en moins de 5 h (TPST : 15 h).

Nous nous changeons, et repartons chargés direction la voiture. Il est 1 h passé quand nous arrivons au gîte. Le repas est bien appréciable, Harry nous paye une bière puis nous allons nous coucher.

Aujourd’hui nous serons en falaise, la journée sera un peu plus cool. Au programme équipement sous contrainte le matin suivi par des démonstrations techniques l’après-midi. Les contraintes pour l’équipement seront les suivantes : 1 kit, 60 m de corde type B en 3 tronçons, 5 As, 12 plaquettes coudées, 8 plaquettes vrillées, 6 cordelettes en Dyneema, 3 mousquetons (1 à vis et 2 sans vis), le matériel à spiter ainsi qu’un perfo. En termes d’équipement il est demandé d’installer plusieurs mains-courantes suffisamment longues, des fractionnements et de terminer par un frac plein vide pour les exercices qui suivront. La falaise étant très peu fréquentée nous devrons planter des spits dont un à la main.

De mon côté je pars directement en main-courante depuis un AN, aucun spit à l’horizon, je tricote un nœud de chaise autour d’un arbre et poursuit dans ma lancée. C’est le moment de taper du spit, quelques fractionnements plus bas Nicolas me fait signe de me décaler sur un bombé pour éviter une descente directe.

Nous remontons manger en empruntant chacun une voie différente. Pour la suite, les cadres se mettront chacun en poids au bout d’une corde et nous devrons les remonter avec le matériel que nous avons toujours sur nous (matériel listé le premier soir lors du tour de table). Pour ma part ça sera une Micro Traxion et un mousqueton autolock. Le balancier espagnol se passe sans encombre puis nous avons le droit à un petit point sur l’utilisation de la Dyneema et son utilisation à outrance.

La situation est concrète, prenons un départ de main-courante placé sur un bombé rocheux. Plusieurs possibilités, la plus simple et efficace semble être deux huit à la suite. La réflexion porte alors sur le fait que la corde entre les deux huit viendrait à frotter s’il y avait rupture du deuxième point. Le réflexe serait alors d’utiliser un bout de cordelette Dyneema. La discussion est ouverte et nous donnons tous notre avis sur la question. Bilan : la corde utilisée (corde de type B dont je n’ai plus le modèle en tête) est donnée pour 1 800 kg avec un nœud de huit. Notre Dyneema Béal est donnée pour 1 500 kg sur un brin va perdre environ 1/3 de sa résistance et oscillera alors autour des 1 000 kg de résistance. Le premier constat parle donc de lui-même. Nous réduisons grandement la chaîne de résistance via la config Dyneema. L’argument de la résistance au frottement fait alors surface, soit… Place à une petite démonstration de résistance au frottement. Nicolas se met en poids sur une Dyneema placée sur une belle arête tandis qu’Harry la fait frotter sur quelques centimètres. Chkling, coupée ! Il aura fallu entre 3 et 4 secondes. Place à notre corde de type B (même config), chkling, coupée aussi, mais cette fois en une douzaine de secondes. Alors, vos départs de main-courante corde ou Dyneema ? Je compte bien reprendre la démo sur les prochains stages en plus des quelques tests que l’on montre déjà (éjection de poignée non longée, etc.).

Nous enchaînons avec un décrochage puis un roulement de trois petits ateliers sur lesquels nous tournons. Je débute par la partie « discussion technique » avec Nicolas, le but et d’échanger sur différentes situations que je pourrais être amené à rencontrer, parler matériel et sur la précision des propos, etc.

Exemple :

  • Ça t’arrive d’être que sur ton bloqueur de poing ?

  • Heu… Oui lorsque que je suis en poignée longée.

  • Poignée longée... Elle est tout le temps longée moi ma poignée, pas toi ???

  • Oui, enfin, poignée chaussée, pas longée…

  • Ah OK, ce n’est pas tout à fait la même chose le choix et l’utilisation des termes à son importance quand tu deviens référent technique ;-)

Le second atelier se déroule avec Vincent, je suis dans une situation où j’assure Vincent depuis le haut alors qu’il remonte en escalade et pour x raisons il vient à chuter, il faut alors le redescendre. La technique d’assurage n’est pas imposée. J’utiliserai pour ma part un demi-cabestan, facile à mettre en place, ne nécessite qu’un mousqueton et permet de descendre la personne sans manipulation supplémentaire. Ayant encore du temps devant nous je referai l’exercice mais cette fois avec une Micro Traxion, le débrayage est basique mais moins efficace qu’au demi-cabestan.

Le dernier exercice est la mise en place d’une tyrolienne largable (en douceur) lorsqu’Harry sera dessus. Les outils à disposition ne manquent pas : descendeur simple, Stop, Rig, bloqueur Basic, poulies diverses et variées… Ayant monté et démonté suffisamment de fois celle que nous installons sur les rives de Meurthe durant l’été je me contenterai d’un Stop et d’une poulie avec Basic pour faire un renvoi.

La journée prend fin nous remontons chacun par la dernière voie que nous n’avons pas encore faite et déséquipons en même temps.

De retour au gîte, nous rangeons le matériel et passons directement au briefing pour la sortie du lendemain. Le réseau est toujours le même mais cette fois-ci nous rentrerons par le A27 permettant de jonctionner avec le P34 des Feuilles Mortes (vers ‑225 m) et de rejoindre plus bas la fameuse salle de la Famine que nous avons ratée de peu le premier jour. Pour cette sortie nous utiliserons des techniques dites « légères » à savoir de la corde de type L (principalement de la Petzl Segment) et divers connecteurs légers (Camp Nano 22, Petzl Speedy ou encore Edelrid Nineteen G). Les kits ne sont pas trop blindés (100 à 150 m de corde et une vingtaine d’amarrages par kit), nous en aurons un chacun, plus un mini kit pour la corde d’entrée. C’est le dernier jour alors aujourd’hui il faut que ça roule ! Sylvain ouvre la marche, l’entrée s’ouvre dans un joint de strate relativement raide, il faut dire qu’ici le pendage est d’environ 60°. Un premier petit puits donne accès à une escalade d’une dizaine de mètres qu’il faut aussitôt redescendre pour trouver la suite. La montée passe bien, mais nous nous faisons quand même la réflexion en sortant qu’il ne faut pas se la coller ici. Les puits s’enchaînent rapidement, il faut bien souligner que cette partie de la cavité est nettement plus plaisante que celle du premier jour. Les puits sont de belles dimensions et les quelques désobstructions et méandres passent sans problème. Nous passons la jonction avec les Feuilles Mortes et découvrons des volumes encore plus imposants, la traversée en sortant par le Tube doit être bien chouette.

Je reprends la fin de l’équipement en commençant par le passage de la vasque. J’ai cru comprendre qu’il n’y avait pas beaucoup de points pour enjamber ladite vasque et que ça en ferait rire plus d’un si mon pied venait à glisser. Après une prise de mains hasardeuse me voilà enfin de l’autre côté on commence à voir la lherzolite et comprenons ce qu’expliquait Nicolas. Après un long toboggan nous apercevons l’équipement en fixe venant du Tube (autre accès du réseau) menant à la Famine. C’est beau, c’est grand, j’en profite pour faire quelques photos au Smartphone. Objectif atteint, nous mangeons un morceau et rebroussons chemin.

La remontée est efficace, nous faisons une pause avec Alex pour observer la faune locale et prendre en photo d’araignées inconnues pour nous. Quelques puits avant la sortie mon pantin me lâche en plein alternatif, ça c’est au moins à force d’avoir parlé de « et si ça, ça vient à lâcher » et « si tu perds ça », … Il est 22 h quand nous sortons, la nuit tombe petit à petit, le retour se fait aux lueurs de nos lampes (TPST : 14 h).

Les kits sont déposés en tas, on verra ça tranquillement demain. Nous rentrons et trinquons à ces quelques jours qui s’achèvent déjà dans quelques heures.

Ce dimanche matin le réveil est plus cool. Pendant que nous désenkitons, Nicolas nous informe qu’il n’y a que les kits et les amarrages à nettoyer, le reste ira en machine chez lui. Quelques coups de Karcher plus tard (décidément luxe jusqu’au bout !), nous voilà prêts pour le débrief du stage.

Pour moi c’est bon le module 1 est validé, me voilà dans le cursus moniteur pour de bon ! Maintenant il faut viser les modules 2 et 3 puis encadrer un stage initiateur pour être titularisé...

Sylvain, qui a pas mal de route, ne tarde pas trop. Mon train étant à 17 h 45 à Toulouse je ne suis, pour ma part, pas spécialement pressé et c’est Vincent qui m’emmènera à la gare. Il est 1 h du matin passé lorsque j’arrive enfin chez moi, le long voyage vers l’Ariège en valait le coup.

Merci à Nicolas pour toute l’organisation de son dernier stage moniteur, à Harry et Vincent pour les conseils et apports durant le stage, à Sylvain et Alex pour les bons moments sans oublier les gérants du gîte et leur fille pour le superbe accueil de ces quelques jours !

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