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300.1 - Vauvougier, acte 11 : ça mouille au fond du Bidouille !
Thibaut Guillemier (photos : Théo Prévot)
mardi 1er août 2023, par
Participants : Sylvain Bourlange, Théo Prévot et Thibaut Guillemier
Le rendez-vous est fixé à 11 h le samedi 1er avril 2023 au bout du chemin agricole près du gouffre de Vauvougier, mais vu le déluge des jours précédents, Sylvain préfère laisser son monospace vers le cimetière. Il craint de se faire « enchewing-gummer » ses serrures de bagnole, suite à sa récente mésaventure dans les rues de Nancy. On le rassure comme on peut, nous sommes à Malbrans… ! On bourre les kits dans mon 4 ´ 4, on passe le bourbier, et on s’extasie devant la Fiat Panda qui a réussi à en faire autant... Bref, on se change sur le seul mètre carré d’herbe pas encore englouti par la boue. Sylvain met 3 plombes à choisir ses affaires pour la nuit, il hésite même à prendre une brosse à dents, je le traite de chochotte. Moi j’étais au clair, ça faisait une semaine que je m’y préparais.
11 h 30 on casse la croûte vers la voiture, ça fait au moins un repas qu’on n’aura pas à trimbaler. Théo nous distribue les gourdes gracieusement offertes par Barrabes, nouveau partenaire de l’Usan.
Cette fois c’est parti, 12 h, Théo, chargé comme une mule, attaque un équipement, aux petits oignons (corde de 8 mm préalablement mouillée et mousquetons légers) par-dessus les cordes de stagiaires en formation dans le puits d’entrée, bien arrosé d’ailleurs ! Les nœuds de chaise double transpirent, il faut dire que dans ses kits on trouve, les cordes évidemment, de la bouffe, de l’eau, un perfo, 4 batteries, des forets, de la tige filetée, des pailles, du matos de secours, des médicaments.... Bref un Castorama, une bagnole du Samu et une pharmacie.
Trois jours plus tôt, Théo nous proposait, dans le groupe Whatsapp de l’Usan, d’emprunter un raccourci trouvé avec Vivien 15 jours avant, mais dit qu’il faudra « juste » faire péter une tête de puits pour passer... Moyennement confiants, on décide de le suivre dans ce plan foireux. Sylvain passe sans élargir, mais ça s’annonce tendu à la remontée. Dix minutes et deux pailles plus tard, problème réglé. Cela ne valait même pas le coup d’en parler. On désescalade quelques mètres pour arriver au sommet de la Grande Galerie (fameuse jonction fraîchement faite par Vivien et Théo après une escalade en artif).
Wahou une belle verticale sur de la Petzl Push 9 mm dans ce gros volume, on revit ! Le pendage est bien net dans cette galerie. On rejoint la partie classique jusqu’à la zone de l’accident de Fabrice. À partir de là, on quitte le format « civière » des méandres et je commence à détester mon kit et à me demander ce que je fous là... Enfin, on descend encore deux cordes/câbles Beal Spelenium Gold (les jaunes comme on utilisait dans mon club à Pommard) dans le beau puits et méandre du Guano. Ce dernier est esthétique, confortable, plein de cupules. Il débouche dans la galerie du Bétail. Sylvain et moi faisons un crochet pour aller voir le sommet du Grand Puits (P40). On rejoint Théo qui nous emmène voir une concrétion bizarre toute tordue et un miroir de faille. Nous revenons sur nos pas et montons dans un labyrinthe sans fin. Nous arrivons au bivouac par 2 puits et une désescalade casse-gueule qui ne rassurait pas du tout Sylvain !
Purée enfin le bivouac ! Nous sommes à ‑190 m, il est environ 17 h ! Franchement ? Il est trop cool ce bivouac, il remonte le moral ! On boit un coup, ou plutôt on se rince la bouche de la poussière sèche de cette cavité (je commence à revoir mon jugement sur la brosse à dents), on mange, on décharge les kits de tout le matos pour la nuit, on charge les bouteilles vides, et on remonte à ‑175 m au sommet du Puits Bidouille. Petite étroiture au sommet mais l’enchaînement jusqu’au fond à ‑213 m : j’adore ! … Malgré une partie pas équipée que je trouve à mon tour un peu limite !
Nous voici à la base du puits Bidouille, les pieds dans un petit cours d’eau actif qui s’enfile dans un méandre (presque impénétrable), mais on devine un puits derrière, et l’écho est prometteur ! C’est justement l’objectif de la mission, franchir ce méandre… ! Sylvain pense qu’en forçant à travers une lucarne en hauteur ça pourrait passer, mais pas hyper raisonnable d’arriver la tête en avant dans un puits inconnu, ou de se coincer ici ! On sort l’artillerie, mèche de 8 mm, une paille, et BOUM ! Vu le bruit, on devrait pouvoir passer les 3 de front ! Mais non, il a fallu aller purger tout ça, et surtout subir le dialogue de sourds trop marrant entre Sylvain et Théo sur la purge, c’était grandiose ! Théo remet une paille, je fais le court-jus ! Vu le bruit, on re-devrait pouvoir passer les 3 de front ! Nettoyage de la zone, et miracle, ça passe ! Pour les 3 de front ce n’est pas encore ça, mais en forçant on y va un par un !
On arrive en haut d’un ressaut de 3 m environ, qu’on désescalade pour finir dans un beau méandre, haut et confortable. On enchaîne 2 virages mais le plafond s’abaisse sérieusement. Sylvain s’engage dans un 4 pattes qui le rebute rapidement. Je lui demande ce qui bloque, il marmonne un truc… du genre que j’en ai déduit que c’était dégueu. Théo arrive en renfort, je rappelle qu’il est 22 h, nous sommes à ‑215 m, ni une ni deux il se jette dans la flotte à plat ventre et parcourt encore une vingtaine de mètres dans un boyau inqualifiable, téléphone portable à la main pour filmer tout ce qu’il y a à filmer. Il avait le sourire jusqu’aux oreilles. Je ne sais pas comment il fait, mais ça c’est un sacré spéléo ! Il commence quand même à se dire que passer la nuit mouillé ne va pas être drôle. Sur le retour dans cette galerie de misère j’entends crier qu’il y a une gravure ASCO sur la roche... Comme nous étions le premier avril et que les blagues nulles filaient bon train, je n’arrivais pas à savoir si c’était du lard ou du cochon ! Visiblement c’était vrai... Un mec épais comme un filet de vinaigre avait réussi à franchir ce méandre avant nous, et sans faire péter... Incroyable. En tout cas ce n’est pas topographié !
Après cette belle découverte malgré tout, on fait demi-tour, Sylvain a sa dose, il attaque la remontée pendant que Théo fait des trous de 8 au large en vue de prochaines missions ! Il ne conçoit pas remonter avec des batteries chargées de toute façon... Je remplis les bouteilles dans le cours d’eau plein de Cæcosphæromas. La pompe filtrante est en panne, tant pis on fera bouillir l’eau. Séance photos dans les puits, je râle un peu dans la partie pas équipée, il faut remonter avec les dents c’est dangereux... Théo me répond un truc que je ne comprends pas, mais je pense qu’il me prend pour une lopette. Il veut refaire une photo à cet endroit justement, mais il se casse la gueule et se claque le coude. Sûrement le bon dieu qui l’a puni, tiens...
On arrive lamentablement au bivouac, j’accroche mon hamac Amazon tout neuf. Eh oui, c’est mon baptême de bivouac souterrain ! Théo prépare une soupe censée se faire avec un litre d’eau, mais il en a juste mis un dé à coudre du coup on a mangé une espèce de pâte archi salée, mais bon, « ça passait bien » pour reprendre ses termes. On se met dans la tente avec deux grosses bougies faites maison, il fait au moins 25 °C, dur dur de retourner au frais pour se coucher ! 23 h 45, un dernier bout de pain avec du saucisson et au dodo. Les 2 se mettent à ronfler en 3 minutes chrono et moi comme d’hab quand je ne suis pas dans mon lit je galère à m’endormir. 3 h du matin, je manque de faire un salto arrière depuis mon hamac en voulant ouvrir mon bidon étanche sans faire trop de bruit, bref j’ai réveillé tout le monde.
Le lendemain, 8 h 15 Théo est fin prêt, il prépare le café et fait bouillir l’eau de la veille en quantité suffisante pour la remontée. Sylvain met (encore) 3 plombes à se préparer, haha ! J’attaque la remontée en premier, j’essaye de retrouver le chemin tout seul. Sylvain, qui me suit, pense que c’est peut-être par-là, mais finalement à plusieurs endroits nous avons besoin de l’expert. Le méandre « Marie Blachère » m’a épuisé autant que la totalité des puits ! À la base d’un P2 on reboit un café et on discute de techniques d’auto-secours. Théo me remémore une procédure de décrochage. Dans la nouvelle verticale de la grande Galerie il veut faire une photo pendant que je remonte. Sylvain en tête m’éclaire et décroche un rocher de 20 kilos, petite frayeur donc pour nous en dessous. Théo dit qu’il changera la corde d’endroit du coup. On remonte à travers l’étroiture élargie à l’arrivée, méandres classiques, et enfin le puits final, encore plus arrosé que la veille, mais magnifique ! Je récupère au sommet le kit perfo d’une lourdeur... porté par Théo tout le long, respect ! On enjambe le barbelé en marchant dessus, et Théo me fait bien remarquer que si le clou pète c’est le drame, je m’embroche les couilles dessus. Remballage du matos, tiens, j’ai dû laisser un mousqueton Spirit au bivouac. Théo me dit que si je veux le revoir, il faudra que je revienne !!! Du coup je ne lui ai pas encore dit, mais je vais leur en faire don !
15 h, on entame une petite discussion sous la flotte, avant de juger qu’elle serait mieux dans un bistro devant une bière. C’est à Larnod qu’on a trouvé notre bonheur !
TPST : 26 h 30 !
Messages
1. 300.1 - Vauvougier, acte 11 : ça mouille au fond du Bidouille !, 13 août 2023, 16:32, par Balacey
Hello
Peut-être bien que c’était moi la limande au fond du puits bidouille. C’est loin 1974 je pense...
Bravo à vous et bonne continuation.
Jean-François BALACEY