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294.1 - Siphon Picon

Théo Prévot (photo : Olivier Gradot)

mardi 7 février 2023, par Bertrand Maujean

Tout commence en septembre dernier lors d’une conversation au Fond de la souche. Alors qu’Éric Pery (conseiller technique départemental de spéléologie des Vosges) nous présente quelques cavités majeures du coin, nous venons à parler d’une faille dans la salle terminale du réseau de Débain à Sans-Vallois. Des travaux de désobstruction au fond de cette fameuse salle ont permis d’atteindre une faille dans laquelle se perdent toutes les eaux du réseau. Un sondage effectué par Jean-Jacques Gaffiot dit Jiji n’a pas permis de mettre en évidence de suite visible, mais pour eux le potentiel est là ! Leur plongeur ayant migré dans les Pyrénées ils m’indiquent que rien n’a été refait depuis, mais que je suis le bienvenu pour tremper mes palmes si je le souhaite. Ni une ni deux la date du samedi 22 octobre 2022 est retenue.

À la suite d’une semaine orageuse les espoirs s’amenuisent un peu… Jiji, qui habite tout près du réseau, nous confirme que le réseau est praticable malgré la météo capricieuse. Bonne nouvelle alors ! C’est ainsi que nous nous retrouvons Jiji et Éric P. (Aragonite, 88), Zoé T., Julien B., Olivier G., Colyne, Honorin et Nicolas P. et moi (Usan) samedi matin au bord du puits des Moustiques. Mon matériel est prêt et tient dans un bon kit. Nous nous équipons et partons. Le puits se compose d’un premier tronçon de 8 m entièrement creusé par nos amis vosgiens afin de shunter le laminoir long de 300 m qui garde l’entrée naturelle. Après un second ressaut de 5‑6 m nous prenons pied dans la galerie principale avec, de part et d’autre, l’amont et l’aval. L’objectif du matin étant la reconnaissance de la faille terminale et, si le temps le permet, d’une branche d’où arrive l’eau perdue bien plus loin en amont, nous prenons le sens du courant. L’eau est loin d’être limpide et le niveau atteste des orages de la veille, Jiji nous dit que le niveau est relativement haut comparé à d’habitude. Les 110 m de galerie sont très jolis, l’ambiance aquatique me rappelle celle de la zone des cascades au Rupt-du-Puits (55). À mon arrivée dans la salle terminale Olivier me lance « T’as déjà plongé dans de la bière ? », une seconde voix réplique « Ouais un bon Picon ! ». Je m’approche et découvre le siphon, il n’y a guère de surprise… Une belle mousse de crue couvre ce qui m’était vendu comme étant une belle vasque bleue (si, si, j’avais même eu des photos). Bon, ben, on va voir ce que cela dit…

Je m’équipe et commence à descendre grâce à l’échelle en place. Je traverse la couche de mousse épaisse d’une bonne quarantaine de centimètres avant de sentir l’eau, ça y est me voilà parti dans l’inconnu. Je descends doucement dans cette faille qui s’enfonce sous mes pieds (au vu des conditions je ne pense pas découvrir des centaines de mètres de galerie j’ai donc laissé mes palmes dehors), la visibilité est nulle j’essaie de repérer tout ce que je peux en tatillonnant. Il semblerait que j’ai atteint le bas de la faille, jusque-là la progression est plutôt aisée. En cherchant un peu je trouve un départ de ce qui semble être une galerie. Ne trouvant aucune aspérité dans les parois pour amarrer mon fil je décide de l’accrocher sur un bloc au sol (ce premier tronçon sera certainement à revoir quitte à mettre une corde depuis le haut). J’arrive péniblement à lire la profondeur en collant un de mes ordinateurs sur mon masque : 9 m. Je progresse dans une galerie confortable en forme d’amande, j’estime la largeur à 1,2‑1,3 m pour une hauteur de l’ordre de 80 cm. Le sol semble solide (pas de talus de glaise), avec parfois des blocs me permettant d’accrocher le fil. Je passe plusieurs étiquettes, la galerie semble remonter un peu entre des blocs, j’essaie de me faufiler (je pense être remonté d’un mètre) mais le passage ne semble pas être là. Je redescends, amarre le fil solidement avec une caouèche suivi d’un cabestan directement sur le caillou. N’ayant aucun moyen de voir mes manos et vu la mise à l’eau il est plus raisonnable de stopper ici et de ne pas faire attendre trop longtemps mes camarades dehors. Je coupe le fil et décide d’arrêter ici pour aujourd’hui. Le retour se fait tranquillement. Je regagne la surface après 17 minutes d’immersion tout le monde est surpris de voir que j’ai pu dérouler 46 m de fil, les sourires sont visibles sur les visages, une belle suite en perspective et qui sait peut-être même une partie exondée au vu des résultats des colorations. La sortie dans la mousse fera bien rire tout le monde, c’est décidé le siphon s’appellera le siphon Picon !

Bilan de cette première reconnaissance : faille verticale (la descente se fait légèrement en décalé) donnant accès à une galerie située à ‑10 m, ses dimensions estimées sont 1,20 m × 0,80 m. Une trentaine de mètres ont été explorés pour l’instant. La visibilité ce jour étant nulle il n’est pas impossible que d’autres départs soient à voir. Arrêt actuel sur rien, la galerie se poursuit main gauche je pense avoir buter dans une faille sur la droite. L’orientation de la galerie sera prise si la visibilité le permet lors d’une seconde plongée.

Merci à tous les spéléos présents ce jour et particulièrement à Éric et Jean-Jacques pour m’avoir donné cette opportunité. La suite au prochain numéro…

Photos d’Olivier Gradot : https://www.flickr.com/photos/olivier_gradot/albums/72177720303098636/

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